Volume 29, 2008
Philosophy in Asia and the Pacific
Patricia Nguyen
Pages 183-195
Comment repenser la « légitimité » de la « philosophie chinoise » dans la perspective ouverte par Maurice Blondel
Le problème de la « légitimité » de la philosophie chinoise est lié à celui de la conception occidentale de la « philosophie » qui est apparue à l’époque moderne, et qui privilégie la forme spéculative de la pensée au détriment de l’autre, plus concrète et pratique, dans laquelle se reconnaissent les tendances spécifiques de la tradition chinoise. Selon les critères occidentaux, la « pensée » chinoise ne peut se voir accorder le statut de « philosophie ». Or, dès 1898,
Maurice Blondel (1861-1949) a dénoncé comme « illégitime » une philosophie exclusivement spéculative et conceptuelle ; il a remis en cause la « suffisance » d’une philosophie privilégiant indûment la pensée discursive, en même temps qu’il a montré la nécessité d’un recours à l’autre forme de pensée, celle qui est liée à la pratique, à la vie. Dans cette perspective, la philosophie occidentale, pas plus que la philosophie chinoise, ne « se suffit » à elle-même ; c’est une
nécessité pour toutes deux de se compléter par leur « opposition » même, dans un dialogue authentique. La « philosophie intégrale », encore à venir, devra faire une part égale aux deux « aspectséléments » de la pensée, que Blondel qualifie de « noétique » et de « pneumatique ».